NAZCA. Valérie valeriec@free.fr Pas de spoiler. Résumé : un petit voyage en Amérique du Sud donne l'occasion à Mulder et Scully d'appronfondir la nature de leur relation; Introduction : Au Pérou, vers le Sud, au bord du Pacifique, cette mer Ténébreuse des Anciens, se trouve le désert le plus sec du monde. Il est formé de pampas successives dont les noms chantent : pampa de Pisco, pampa de Ica... 250 kms de sable aride et de pierraille, où il n’a pas plus depuis des millions d’ années. Là, dans cet étrange et bizarre endroit, se trouve la plus grande énigme archéologique du XXème siècle : les pistes de Nazca. D’immenses dessins géométriques, à même le sol, des routes qui ne commencent nulle part puis s’arrêtent soudain, des oiseaux gigantesques aux ailes de grains de sable, un féerique bestiaire comprenant un lézard, un pélican, un singe, une araignée, un orque, un iguane... Au Sud de Nazca : La jeep roulait depuis plusieurs heures sur la piste caillouteuse et défoncée. Scully repoussa pour la centième fois la mèche de cheveux qui lui tombait sur le visage. Il lui semblait que sa peau était couverte de poussière et sa gorge la brûlait. Le soleil était encore haut et elle plissait les yeux malgré ses lunettes de soleil. Bataillant avec le sol irrégulier, Mulder s’aggripait au volant comme un forcené. Des gouttes de sueur ruisselaient sur son front, son tee shirt était trempé, mais il continuait à se battre pour arriver à son but. Soudain la jeep quitta brutalement la piste et Scully vit avec effroi Mulder être éjecté violemment sur le sol pierreux. La jeep finit sa course contre un gros rocher. Choquée, mais sauvée par la ceinture qui la retenait, Scully se dégagea et descendit rapidement pour se rendre compte de l’état de son partenaire. Il était conscient, mais son visage était crispé par la souffrance. Son visage portait quelques écorchures, et il se tenait la jambe ,se mordant la lèvre inférieure pour contenir la douleur. - Est ce que ça va ? - C’est ma jambe. Scully dégagea avec précaution la cheville de Mulder. Elle délassa délicatement la chaussure et ôta la chaussette. Sa cheville était déjà très gonflée. Mulder gémit lorsque elle effleura la malléole externe. - C'est sans doute une fracture, Mulder. Tu as très mal ? - Oui... - Je vais t'immobiliser la cheville avec un bandage. Cela te soulagera un peu. Je ne peux rien faire de plus ici. Ca va aller? Elle le regarda avec inquiétude. Il était au bord de l'évanouissement, le visage très pale et les lèvres serrées par la douleur. - Ne t'en fais, Scully, je vais tenir le coup. Sa voix était rendue rauque par la douleur et son langage corporel démentait ses paroles. Ses mâchoires se contractaient spasmodiquement. Scully nettoya les quelques coupures sur son front et elle l'installa le plus confortablement possible contre la portière de la voiture. La nuit commençait à tomber et la température fraîchissait rapidement. - Le radiateur est foutu. Je crois bien qu’on est coincé ici. Je vais appeler les secours. La radio doit encore fonctionner. Elle se brancha sur la fréquence et commença à lancer un appel. Mulder avait posé sa tête contre la portière et essaya d'oublier la douleur qui montait en vagues de sa jambe droite, lui donnant presque la nausée. Il lui semblait qu'il entendait la voix de Scully à travers un épais coton. - Nous ne pouvons pas envoyer de secours avant le lever du jour. Nous n'avons aucun appareil disponible. - J'ai un blessé ici qui a besoin de soins! - S'il n'y a pas d'urgence vitale, je ne peux rien faire pour vous. Il faut que vous attendiez demain. Scully raccrocha avec rage, pestant contre l'inertie administrative du Pérou. Mulder allait souffrir le martyre avec sa fracture. Elle s'approcha de lui et s'accroupit à son niveau. - Je suis désolée, Mulder. Il va falloir que tu attendes. Ils n'ont rien voulu savoir. - J'ai entendu. Tu as fait ton possible, Scully. Ca va aller, ne n'inquiète pas pour moi. - Tu es sûr? Il hocha la tête et lui sourit faiblement. - Tu veux manger quelque chose? - Non... J'aurais plutôt envie de dormir. Elle s'assit près de lui et entoura ses épaules de son bras, puis doucement le fit basculer sur ses genoux. Le mouvement déclencha une nouvelle vague de douleur. - Ah ..... - Pardon. - Ca va. Elle lui caressa les cheveux. Il trouvait finalement que la situation n'était pas si mauvaise. Il adorait quand Scully prenait soin de lui ainsi. Il ferma les yeux de ravissement et lui murmura - Promis, je ne te demande pas de chanter ce soir. Il sentit son sourire dans l'obscurité. - Pourquoi, c'était si mauvais que ça? - Non... mais il fait beau ce soir. Profitons de ce ciel magnifique. - Tu vois où tes idées extravagantes nous conduisent, Mulder. Tu peux m'expliquer ce qu'on fait là, en plein désert? - Tu n'as pas envie de voir ces fameuses lignes de Nasca, Scully? Tu n'es pas curieuse ? - Si, bien sûr. Mais on aurait pu prendre le chemin normal. Ca nous aurait éviter cette mauvaise piste et cet accident stupide. - Oui, mais nous n'aurions pas vu ces lignes fabuleuses de la colline. - D'accord, Mulder, tu as raison. Il frissonna soudain et Scully accentua la pression de ses bras contre lui. - Tu as froid? - Oui, un peu. - Je crois qu'il a une couverture dans la jeep. Elle se leva avec précaution, évitant de trop le bouger et fouilla dans la jeep. Il y avait un plaid en laine. Elle se rassit près de lui et l'installa de nouveau sur ses genoux. Il se blottit contre elle, cherchant sa chaleur. - Tu es en état de choc, Mulder. C'est pour cela que tu as froid. Essaye de respirer profondément. Elle le sentit inspirer et expirer bruyamment et se mit à rire. - Quoi ? - Rien. Dors. - Bon anniversaire, Scully. Scully leva la tête vers les étoiles. Le ciel de l'hémisphère Sud était si différent qu'elle avait du mal à trouver les repères habituels. La nuit était maintenant tombée sur la pampa. Mulder, la tête sur ses genoux, se détendait progressivement. Sa respiration se fit plus ample et son visage se détendit. Dieu qu'elle aimait le voir ainsi, abandonné, totalement relaxé. Son visage se transformait, elle découvrait un autre Mulder. Un Mulder qu'elle pourrait connaître si un jour... Elle l'aimait, c'était indubitable. Avec toute son âme, avec toute sa force, avec tout son coeur. Elle le connaissait par coeur. Chaque ligne de son visage, la rondeur de sa lèvre inférieure, la courbe de ses sourcils. Elle le connaissait aussi bien qu’elle même. Elle aurait voulu caresser ses cheveux doux et indisciplinés, sa nuque humide, le contour de ses oreilles si bien dessinées. Sa main était là, hésitante, troublée, presque craintive. Mais qu’est ce qui les empêchaient d’aller plus loin dans leur relation ? Le regard des autres, au FBI ? Beaucoup de personnes au bureau pensaient qu’ils étaient déjà un couple. D’ailleurs, même en dehors du bureau, on les prenait pour un couple. Lorsqu’ils descendaient dans un hôtel pour un enquête, on leur proposait systématiquement une seule chambre. Lorsqu’ils se présentaient devant un shérif local, même chose. Cela devenait presque un jeu entre eux, et lorsqu’ils avaient fait cette enquête en Californie, ils avaient poussé le jeu très loin. Avec humour, ils étaient presque devenus mari et femme l’espace de quelques jours. Mais il ne s’était rien passé. Ils se retenaient, l’un et l’autre, comme s’ ils avaient peur de leurs propres sentiments. Bon Dieu, elle savait qu’il la désirait, il suffisait de voir ses regards appuyés, d’entendre sa voix qui devenait plus rauque soudain, de sentir l’effleurement de ses mains sur son corps. Ils avaient peur. La crainte absurde que le fait de pousser leur relation plus loin ne détruise la formidable, l’incroyable amitié qui les unissait. Ils n’osaient pas franchir le pas. - Tu dors, Mulder ? Il ne répondit pas. Il s’était endormi. Comme un enfant. Deux jours plus tôt : Mulder entra dans le bureau envahi par les odeurs de peinture et les ouvriers du bâtiment avec un petit sourire aux lèvres. Il brandissait avec malice deux billets d’avion. - Je t’enlève à cet enfer, Scully. On met les voiles. - Mais qu’est ce que tu racontes ? - Les pistes de Nazca, ça te dit quelque chose, Scully. On part dans trois heures. - Tu rigoles, j’espère ? - Écoutes, on ne peut pas travailler ici dans ces conditions. Et comme personne ne semble prêt à nous accueillir dans les étages, j’ai pensé qu’on pourrait prendre quelques jours de congés... C’est ton cadeau d’ anniversaire, Scully. Tu te rends compte, c’est le Pérou !!!! - Très drôle, Mulder. - Je ne plaisante pas, Scully. Allez, on passe chez toi chercher tes affaires. Deux heures plus tard, ils étaient à l’aéroport. Mulder avait quitté son costume strict pour revêtir son jean noir préféré, un tee shirt blanc et son éternel blouson de cuir. Elle l’avait suivi sans trop réfléchir, après tout pourquoi pas ? Elle avait besoin de vacances, elle avait envie aussi de se retrouver avec lui, loin de tout. Il se comportait différemment avec elle dès qu’ils sortaient du cadre strict du boulot. Il était plus... comment dire... plus séduisant encore. La perspective de passer plusieurs jours avec lui n’était pas pour lui déplaire, au contraire. Pendant le vol, il l’abreuva de théories sur la nature et le but des lignes mystérieuses, lui prouvant encore une fois l’étendue de son savoir. Elle pouvait l’entendre parler pendant des heures, plongeant dans son regard pétillant, bercée par ses paroles. Mais elle ne pouvait pas non plus s’ empêcher de le contredire dans les hypothèses les plus farfelues, incapable de contenir son esprit cartésien. Il en résultait des joutes oratoires dont ils sortaient tous les deux épuisés mais si heureux... Ils finirent par s’endormir, côte à côte, leurs chevelures se mêlant, sa tête contre son épaule. A l’aéroport de Lima, Mulder démontra qu’il n’avait pas totalement oublié ses cours d’espagnol. Il se débrouilla pour obtenir deux places sur la ligne intérieure qui les conduirait à Nazca, au Sud de Lima, le long du Pacifique. Le paysage était magnifique et malgré l’aspect peu fiable du coucou, ils apprécièrent le paysage. Arrivés à Nazca, épuisés par le voyage, ils prirent une chambre dans le meilleur hôtel de la ville. Une chambre. - Scully, je t’assure, c’est mieux ainsi. Je doute qu’ils aient ici un service d’ordre dans l’hôtel. Je préfère qu’on reste ensemble. - Mulder, je suis assez grande pour me défendre. - Tu n’as pas ton arme, Scully. Je te promets d’être sage. Ils se regardèrent en souriant et s’installèrent dans la pièce. Le lit était large et ils s’y allongèrent, épuisés, sans même prendre le temps de se déshabiller. Ils dormirent ainsi plusieurs heures. Leur réveil fut brutal. Une bamba passait dans la rue juste sous la chambre, et les notes endiablées les fit sortirent de leur torpeur. Ils se rafraîchirent dans la petite salle de bains et sortirent rejoindre la fête. Scully découvrait Mulder sous un jour nouveau. Simplement vêtu d’un pantalon blanc et d’un polo bleu marine, il était souriant et gai comme jamais. Il l’ entraîna dans une danse langoureuse, et ils se dévorèrent du regard. Elle ne pouvait pas détacher ses yeux de ses prunelles tour à tour grises, vertes ou noisette qui l’envoûtaient, ensorceleuses, de ses lèvres sensuelles. Ses mains sur son corps la brûlaient, et elle n’avait qu’une envie, l’embrasser, enfin. Reprendre là où tout s’était arrêté, il y a quelques mois, dans le couloir de son immeuble. Ils n’avaient jamais reparlé de ce moment. Pas une fois, ils n’avaient évoqué l’instant qui aurait pu les unir. Réprimant leurs désirs, ils avaient repris leurs distances. Désert de Ica : La nuit était sublime. Le clair de lune éclairait la pampa de façon étrange et féerique. Chaque rocher se détachait, évoquant des formes tour à tour animale ou humaine. Scully n’avait pas dormi. Elle regardait sa montre une nouvelle fois, plus par habitude que par lassitude. Elle se sentait parfaitement bien, l’homme qu’elle chérissait dans ses bras, offert, à sa portée. Il s’agita soudain dans son sommeil et leva son visage vers le sien. Un sourire se dessina sur ses lèvres. - Quelle heure est il ? - Presque 4 heures. Le soleil se lèvera dans deux heures. Comment te sens tu ? - Ca va. Je ne sens presque pas ma cheville... Comme si elle était engourdie. As tu dormi un peu ? - Non. Mais ça va. Je ne suis pas fatiguée. - Tu es sûre ? - Oui. Je suis parfaitement bien. Malgré son éveil, il restait dans le confort de ses bras. - Je suis bien aussi, Scully. Elle lui sourit, lumineuse. - Sais tu pourquoi tu es bien, Scully ? Malgré le froid, malgré les pierres sous nos fesses, malgré tout ça ? - Parce que nous sommes tous les deux ? Sa voix était hésitante mais affirmative. - Parce que nous sommes ensemble. La voix de Mulder était un murmure qui la fit frissonner. Il y eut un long silence, puis il se dégagea doucement de l’étreinte de ses bras pour se relever, et inverser la situation. Avec des gestes lents et doux, il la prit dans ses bras, et l’installa tout contre lui. Son visage dans sa nuque, il accentua la pression de ses bras et elle s’abandonna contre lui, heureuse et paniquée à la fois. Mais seules leurs respirations se mêlèrent, à l’unisson.