Auteur : Valérie Email : valeriec2@wanadoo.fr Titre : LA LETTRE Spoilers : Requiem, Within, Without. Résumé : Mulder écrit une lettre à Scully expliquant son enlèvement. Dana, Si tu lis cette lettre que va te remettre Frohike, c’est que l’espoir fou que j’avais mis dans cette aventure s’est démenti. Je pensais, j’espérais de toutes mes forces, que mon enlèvement impliquerait ma guérison, et mon retour. C’était ma seule chance de survie. Si je n’ai pas voulu que tu m’accompagnes en Oregon, Scully, c’est parce que je savais ce qui m’attendait. Je savais qu’ILS allaient venir chercher les hommes et les femmes qui avaient les mêmes caractéristiques que moi. Ils ont tous expérimenté une intense activité cérébrale il y a quelques mois, cela même qui m’a conduit dans les murs de cet hôpital psychiatrique. J’ai accepté mon destin plus facilement encore que je savais que c’était ma seule chance. Avec cette lettre tu trouveras l’ensemble de mon dossier médical. Tu comprendras alors pourquoi j’ai pris cette décision, et pourquoi je l’ai prise sans t’en parler. J’étais mourant, Dana. Et je ne voulais pas que tu assistes à la lente dégradation de mon état physique et mental. J’ai trop souffert de te voir rongée par le cancer il y a quelques années pour t’infliger la même torture. Tu me trouveras sans doute égoïste de ne pas t’en avoir parlé. Mais c’était pour mieux te protéger, mon amour. Nous avons vécu quelques mois de bonheur qui resteront au fond de mon coeur jusqu’à la fin de ma route. Après tout ce temps, après ces longues années passées près de toi, j’ai enfin réussi à trouver le courage de t’aimer. J’ai refoulé ma peur d’être rejeté, j’ai pris l’initiative de t’avouer mon amour, et cette nuit du millénium fut notre révélation. J’ai ressenti les premiers troubles quelques jours seulement après cette nuit là. Ne culpabilise pas de n’avoir rien vu, ça c’est mon domaine. Les malaises étaient discrets, les nausées insidieuses mais rarement spectaculaires, les maux de tête n’avaient rien de plus que les migraines dont tu m’as vu souvent souffrir depuis que l’on se connait. Comme tu peux le voir dans mon dossier médical, j’ai cherché désespérément l’homme qui aurait pu faire quelque chose pour moi. J’ai consulté les meilleurs spécialistes de ce pays, et même au delà. Ce voyage en Angleterre n’était qu’un prétexte pour solliciter un avis chirurgical à Londres. Lorsque la sentence est tombée, implacable, j’ai pensé au suicide. Mais j’ai eu peur que tu ne comprennes pas, que tu souffres plus encore. L’enlèvement par les extra-terrestres m’a semblé tellement plus en rapport avec ma nature... Écoute les conseils que je t’ai donnés lors de notre dernière nuit ensemble, mon amour. Fais de ta vie une réussite. Pense à toi, pense à fonder un foyer, une famille. Lorsque je t’ai vue avec l’enfant de Teresa, j’ai vu la mère qui est en toi. Et ça m’a fait mal de savoir que jamais tu ne pourrais porter un enfant, que tu ne connaîtrais jamais ce bonheur. Fais le bonheur d’un enfant, Scully. Je suis sûr que quelque part dans le monde, un enfant t’attend. Ma disparition va te sembler cruelle, mais au moins tu garderas toujours en toi l’image de l’homme que tu as aimé. Et jamais tu ne connaîtras la douleur de me voir mourir lentement, de façon dégradante. Et un jour peut être quelque part nous serons réunis. LA DECISION Je suis assis sur ce fauteuil confortable depuis près d’une heure. Je regarde ma montre toutes les trois minutes et je fixe la porte capitonnée comme si je pouvais la forcer à s’ouvrir. La secrétaire me lance des petits sourires contrits, comme pour s’excuser du retard. Je la rassure en lui souriant en retour et je jete un oeil sur les magazines luxueux qui couvrent la table basse en marbre. L’endroit est somptueux. Le cabinet se situe dans le meilleur quartier de la ville, dans un immeuble superbe. Je n’aurais jamais pu m’offrir cette consultation avec mon simple salaire. Mes parents m’ont laissé plus d’argent que je ne pourrais jamais dépenser, alors autant l’utiliser maintenant que je le peux encore. Mes mains se crispent sur mon dossier. Une épaisse enveloppe, contenant tous les documents que l’homme que je vais rencontrer dans quelques minutes m’a demandé d’apporter. IRM, scanner, tous les examens que j’ai subis depuis ces dernières semaines sont là, et avec eux leur sentence de mort. Le docteur Madison est le meilleur neuro-chirurgien de tout le pays. D’après les médecins qui m’ont examiné, il est le seul à pouvoir tenter quelque chose pour moi. Quelques mois après mon “opération” du cerveau, j’ai commencé à ressentir des troubles. Je les ai mis sur le compte de la fatigue, du stress, mais quand j’ai commencé à perdre un peu de sensibilité dans les doigts, à avoir des troubles de mémoire, j’ai consulté. Sans en parler à Scully. Je me souviendrai jusqu’au bout du médecin qui m’a appris de la gravité de mon état. Il avait à peu près mon âge, et son visage était sérieux. Il m’a expliqué ce qu’impliquait la tumeur qui grossissait en moi, puis m’a conseillé de consulter le service de neuro-chirurgie de l’hôpital. On m’a fait subir d’autres examens, plus ou moins douloureux et la sentence est tombée. Ma tumeur est inopérable. Elle se situe entre le cervelet et le bulbe rachidien, la plus mauvaise place pour une tumeur. La chimiothérapie est inenvisageable, de même que la radiothérapie. Ma dernière chance est ce chirurgien. La porte s’ouvre enfin et je me lève d’un bond, ne réalisant que quelques secondes plus tard que mes jambes me portent à peine, tant je suis stressé. J’entre dans son bureau et je lui tends mon dossier. Il l’examine longuement, me pose quelques questions et son regard se pose gravement sur moi. Je déglutis avec peine. Ma vie est entre ses mains. - Monsieur Mulder, j’aurais aimé pouvoir vous rassurer... Mais je ne peux rien pour vous. Personne ne peut rien pour vous. Même si je tentais l’opération, vos chances de survie seraient infimes. Je ne prendrais pas ce risque. Je suis désolé. Le monde s’écroule autour de moi. Les images défilent dans ma tête. Scully, Samantha, ma mère. Je suis effondré et je n’arrive pas à prononcer la moindre parole. Puis je me reprends et je pose les questions qui me tiennent à coeur. Le temps qu’il me reste, la façon dont je vais réagir à l’extension progressive de la tumeur. Il me répond aphasie, paralysie progressive, perte de mémoire... Je l’écoute à peine. Je sors de son bureau, serrant contre moi les preuves de ma mort prochaine. Les sons ne me parviennent pas, je regarde les visages dans une sorte de flou. J’ai l’impression de vivre un mauvais rêve. Le pire de tous. Je me retrouve sans vraiment comprendre comment dans ma voiture garée non loin de là. Je me laisse aller contre l’appui tête, et lentement j’essaye de reprendre le contrôle de mes émotions. Je n’irai pas jusqu’au bout de la route. Je trouverai un moyen d’échapper à cette lente déchéance. Quelque soit le moyen. LE RETOUR Comme tous les soirs depuis trois semaines, Dana Scully s’endormait en tenant dans ses mains la lettre que lui avait remis Frohike. La lettre testament de Mulder. L’explication de son départ. Le visage rougi par les larmes, elle dormait quelques heures par nuit, accablée par la douleur et la fatigue de la journée, lasse de ne pas voir aboutir les recherches pour retrouver Mulder. Son état de fatigue était accentué par sa grossesse, elle portait leur enfant depuis six mois maintenant. C’était la seule chose qui la poussait en avant, vers l’avenir, la seule chose qui l’empéchait de sombrer dans le désespoir. Ils avaient épuisé toutes leurs ressources. Les Lone Gunmen, Skinner, Doggett, ils avaient tout tenté pour récupérer la moindre information concernant Mulder. Rien. Il avait disparu de la planète, s’était évaporé dans l’espace. Les autres abductés de cette nuit là n’étaient pas non plus réapparus. Cinq mois. Cinq mois d’attente et de souffrance, cinq mois à espérer chaque jour son retour. Jusqu’à cette lettre. Elle l’avait relue des dizaines de fois, chérissant l’écriture régulière, respirant l’odeur du papier, comme elle se blottissait dans ses tee-shirts et dans ses draps. Puis la colère l’avait submergée, elle aurait pu faire quelque chose pour lui, elle l’aurait soutenu, elle l’aurait chéri jusqu’au bout. Après quelques jours de pleurs et de désespoir, elle avait enfin compris son geste. Sa mère lui avait relaté l’abîme de douleur dans lequel Mulder avait sombré après sa propre disparition. Elle lui avait raconté l’homme qu’il était devenu, l’ombre de lui même, l’ombre de son ombre, cet homme pâle aux yeux hantés par la douleur et la culpabilité. Cet homme incapable de se nourrir, incapable de dormir, qui ne trouvait de repos en dehors de ses bras, cet homme qu’elle avait bercé comme un enfant, dont elle avait essuyé les larmes. Elle ne pouvait pas se permettre cela. Elle portait leur enfant, elle portait cette vie miraculeuse qui grandissait en elle, jour après jour. Elle devait être forte. Elle dormait si profondément qu’elle mit du temps à entendre la sonnerie insistante du téléphone. ************* Elle porta machinalement la main à son ventre. L’enfant se manifestait toujours lorsque elle était inquiète ou stressée. Elle caressa doucement son ventre arrondi et les mouvements du bébé se firent plus doux. Le vol de nuit était presque désert. Skinner se tenait près d’elle, attentif et concentré, aussi terrifié que Scully par l’idée que l’homme vers lequel ils volaient ne puisse être Mulder. Par deux fois ils avaient ainsi quitté Washington par le premier vol, pour arriver dans un hôpital où on leur avait présenté un vague sosie de l’homme qu’ils cherchaient si désespérément. Deux fois il avait vu la douleur de Scully, son visage blanc comme neige, son mutisme pendant leur retour. Chaque fois sa culpabilité d’avoir perdu Mulder grandissait, comme Mulder avait été rongé pour avoir laissé Scully à Duane Barry. Voyant que Scully avait fermé les yeux quelques minutes, il sortit la photo que l’hôpital lui avait envoyé par e-mail quelques heures auparavant. L’homme maigre et au visage émacié, aux paupières translucides, paraissait être Mulder. Scully avait étouffé un gémissement en découvrant la photo. Ses yeux avaient cherché le grain de beauté sur la joue droite, la lèvre inférieure sensuelle, le nez fort et le front large de son amant. Ses mains avaient glissé sur le papier froid et elle avait acquiescé de la tête, trop émue pour parler. Il l’avait conduit dans la nuit sombre jusqu’à l’aéroport, dans un silence total. ******************** Ils se tinrent un moment devant la porte des urgences, puis après un regard, la poussèrent. Le service était calme à l’aube de la nouvelle journée qui commençait et ils se dirigèrent vers l’accueil. La réceptionniste leur indiqua le médecin qui avait contacté Skinner. C’était un homme d’une quarantaine d’année, au visage fatigué par la nuit de garde. Ils montrèrent leurs badges d’un seul geste et il les conduisit vers une salle silencieuse. Scully respira profondément avant de porter ses yeux sur le corps qui reposait sur le lit. Ses yeux se remplirent soudain de larmes et Skinner lui même serra les lèvres très fort pour ne pas laisser l’émotion le submerger. C’était lui. Le médecin rompit le silence pesant qui s’était installé. - Il est dans un état stationnaire. Il a été admis à deux heures du matin cette nuit, il était en hypothermie, son coeur était faible et il présente des signes de malnutrition. Est-ce-que c’est l’homme que vous cherchez ? Skinner répondit d’une voix étranglée par l’émotion. - Oui. C’est bien lui. Il va s’en sortir ? - C’est difficile à dire. Il est dans le coma, mais ses constantes sont stables. Pouvez-vous me renseigner sur ses antécédents ? Il présente une cicatrice assez récente à la base de son crâne et une autre qui paraît plus ancienne sur le lobe temporal. Scully était incapable de répondre, son attention était focalisée sur Mulder. Mulder qui respirait grâce à un respirateur, Mulder bardé de toutes parts de sondes et de perfusions. Mulder vivant. Elle se laissa glisser lentement sur le sol et ne reprit connaissance que quelques minutes plus tard, allongée sur une table d’examen, les visages anxieux de Skinner et du médecin penchés sur elle. - Ce n’est rien. C’est un simple malaise. Je vais mieux. Je veux retourner près de lui. ***************** Ils se relayaient tour à tour près de lui depuis trois jours. Mulder respirait maintenant par lui même, son visage avait repris les couleurs de la vie et ils n’attendaient plus que son réveil. Sa température était remontée, il ne montrait pas de signe d’infection et l’électro-encéphalogramme montrait des signes d’activité cérébrale. Les médecins étaient optimistes quant à son éveil prochain. Ils lui avaient fait passer un scanner et une IRM qui montraient la disparation complète de la tumeur précédément décrite sur les documents que Scully avait apportés avec elle. Elle sommeillait sur le fauteuil près de son lit quand elle sentit une pression dans sa main. Elle ouvrit des yeux rougis par le manque de sommeil et son visage s’éclaira quand elle vit les yeux délavés, mais si vivants de Mulder se poser sur elle. D’une voix rocailleuse, trop longtemps inutilisée, il prononça ses premiers mots. - J’ai mal... Elle pressa immédiatement le bouton d’appel des infirmières pour signaler qu’elle avait besoin d’aide et posa une main douce sur son front. - Dana... J’ai mal à la tête... - Oui... On va te donner tout de suite quelque chose pour te soulager. Il ferma les yeux, épuisé par ces quelques mots. - La tumeur...? - Elle a disparu, Mulder. Tu vas bien. Tu vas te remettre très vite. - J’ai si mal... - Chut, ne parle pas... Tu vas te fatiguer. Tu as besoin de repos. Avant même que l’infirmière lui injecte un calmant, il s’était rendormi, un petit sourire sur ses lèvres sèches. Scully le regarda dormir, si paisible, avant de quitter la chambre pour avertir Skinner. **************** Vous voulez la suite ??? Demandez la moi très gentiment -:)))